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─ Chapitre 5 ─
LES BASES DE LA VOCATION
Il est vrai que toute vocation commence sur
les genoux de la maman, mais c'est aussi vrai pour le rôle du papa. Les parents,
autant le père que la mère, ont un rôle primordial vis-à-vis de la vocation de
leurs enfants. Leur influence peut s'exercer sur eux, soit dans leur éducation,
soit dans les appuis qu'ils leur donnent pour les aider à prendre leur décision.
La formation religieuse reçue dès leur
enfance au foyer familial, les encouragements au bien, les bons exemples,
l'éloignement des occasions dangereuses, et tout cet ensemble de soins paternels
et maternels destinés à inculquer des principes chrétiens et à orienter sans
cesse dans la voie du devoir et de la vertu: voilà autant de bases capables
ensuite de provoquer chez l'enfant une réflexion plus poussée et de conduire aux
engagements de la vocation qu'il aura choisie.
Cette perspective réconforte les parents
désireux de rendre leurs enfants dociles à la grâce de Dieu. Aussi, les parents
soutiendront les efforts de leurs enfants dans l'étude des vocations: la vie
religieuse et sacerdotale – la vie laïque dans le célibat – la vie laïque dans
le mariage chrétien. Ils doivent s'assurer que chaque vocation soit bien
comprise pour que l'enfant puisse faire un choix bien éclairé.
Malgré tous les scandales que le monde se
plaît à nous rappeler, les parents chrétiens n'hésiteront pas à présenter à leur
fils le sacrement de l'Ordre, cette vocation admirable que le Christ institua à
la dernière Cène.
Le sacrement de l'Ordre, tout comme le
Baptême et la Confirmation, sont les seuls sacrements qui ne sont reçus qu'une
seule fois dans la vie. C'est pourquoi on dira que le prêtre est ordonné prêtre
pour toute sa vie. Même s'il venait à quitter son ministère dans l'Église, le
prêtre ne peut quitter le sacerdoce.
Chaque siècle a compté des prêtres qui ont
brillé d'un éclat tout spécial par leur sainteté. Ils ont été l'honneur de
l'Église.
C'est une mission aussi belle que redoutable car le prêtre ne se sauve pas seul
et ne se perd pas seul. Un prêtre entrera au ciel avec un brillant cortège
d'élus qui seront sa couronne, ou tombera en enfer suivi d'une multitude de
damnés qui seront sa honte et sa confusion.
Contribuer à la vocation et à la
sanctification d'un seul prêtre, c'est arracher des âmes à l'enfer et travailler
efficacement au salut de toute une population, c'est du même coup sauver un
millier d'âmes.
Le prêtre est l'espoir de demain, non pas
pour une mainmise du cléricalisme, mais pour assurer le redressement social par
le redressement surnaturel. Le salut? Il est dans le prêtre, voix de l'Évangile,
pieu planté par la main de Dieu pour arrêter la montée des décadences du monde.
Le salut, ce sont ces prédicateurs prêchant
la Parole de Dieu à temps et à contretemps, avec un tel accent de conviction et
une telle flamme de charité que les âmes, remuées jusqu'au plus intime, pleurent
leurs péchés et promettent une plus grande fidélité au devoir et à la vertu.
Le salut, ce sont les confesseurs toujours
prêts à se rendre au confessionnal pour y accueillir avec bonté tous les
pécheurs.
Le salut, ce sont ces pasteurs tout entiers
à leurs ouailles: recherchant une brebis égarée; allant au-devant d'un enfant
prodigue; apportant réconfort aux âmes meurtries par le deuil et les injustices.
Le salut, ce sont ces prêtres qui, par leur
piété, par leur dignité durant la messe, donnent aux fidèles l'impression qu'ils
voient Notre-Seigneur à l'autel.
Le salut, ce sont les directeurs spirituels
qui conduisent les âmes sur les sommets de la perfection.
Le salut, ce sont les missionnaires. Après
avoir laissé leur famille et leur pays, ils vouent leur existence au salut des
populations étrangères, non seulement en soulageant leurs misères, mais surtout
en leur donnant la liberté des enfants de Dieu.
On ne peut les voir sans penser à Dieu. On
ne les approche pas sans se sentir meilleur.
Les années passeront sur les œuvres humaines
et les mettront en ruine. Les siècles ne sauraient toucher à l'œuvre des
prêtres, car le sacerdoce est éternel.
Sans doute la vie sacerdotale et la vie
religieuse sont en soi plus élevées que la vie laïque, parce qu'elles consistent
en un don plus total de soi-même à Dieu.
Le choix de la vie religieuse réclame des
aptitudes bien précises, un appel d'En Haut manifesté par certains signes, et
enfin l'acceptation de l'aspirant par les supérieurs de la communauté religieuse
à laquelle il se destine.
Pour la vie religieuse, il y a plusieurs
étapes de préparation (postulat, noviciat, premiers vœux, puis vœux perpétuels),
qui permettent au candidat de vérifier avec son directeur spirituel et les
supérieurs de la communauté si cette vocation est bien la sienne.
La vie laïque, d'autre part, se détermine
d'une manière différente: On a la vocation laïque si on n'a pas la vocation
religieuse.
La première erreur à éviter, c'est d'écarter
sans examen la vocation religieuse: se décider pour la vie laïque sans se
renseigner sérieusement sur l'autre voie.
Un second danger, c'est de n'avoir, au sujet
de la vie laïque elle-même, que des vues superficielles. On s'oriente alors vers
cette voie sans la moindre réflexion et sans le souci de perfection.
Mais pour le mariage, il n'y a pas d'autre
période préparatoire que le temps des fréquentations, et la période des
fiançailles.
En plus, dans le mariage, il y a deux
personnes en cause, qui doivent avoir la vocation du mariage. Si l'un des deux
n'est pas appelé au mariage, il y aura des complications plus tard dans la vie
du couple et de la famille qu'ils fonderont. La vie familiale sera plus
difficile à vivre mais Dieu reste présent aux besoins de ces couples et de ces
familles en difficulté, prêt à répondre à leurs prières.
Dans notre siècle noyé par l'athéisme, le
premier état de vie combattu par l'esprit du monde, c'est bien entendu le
sacerdoce et la vie religieuse. Dans l'opinion publique, les scandales
l'emportent sur les bons exemples. Il est donc impératif de remettre les
pendules à l'heure et ce devoir incombe d'abord aux parents, puis aux autorités
religieuses elles-mêmes.
Depuis le Concile Vatican II notamment, les
prêtres et les religieux qui ont abandonné leur costume religieux, croyaient
ainsi se rapprocher de la population. Mais c'est l'effet contraire qui s'est
produit: dans l'anonymat de leur habit civil, ils se sont mélangés à la foule et
ils sont devenus, pour ainsi dire, comme invisibles.
Par conséquent, il est très difficile pour
les jeunes d'aujourd'hui de reconnaître ces personnes exceptionnelles que Dieu a
choisies pour évangéliser le monde.
Sur ce point, les astuces de Satan ont bien
fonctionné et on a vu une baisse dramatique de candidats à la vie sacerdotale et
religieuse. Pourtant, nous savons que Dieu appelle encore les âmes qu'Il réserve
à son service. Mais cet appel est souvent étouffé de plusieurs manières.
Il faut éviter de pousser, sans
discernement, un enfant à la vie religieuse et sacerdotale. Mais il n'est pas
permis d'ignorer cette vocation, comme le font les parents qui sont esclaves de
l'esprit du monde. Ils sont gravement coupables, les parents qui empêchent leurs
enfants de recevoir l'information sur l'état religieux.
Les défauts, l'inconstance, et même certains
égarements de jeunesse ne démontrent pas toujours qu'un enfant n'est pas appelé
à l'état religieux. Cet état de vie offre les secours les plus efficaces pour se
corriger de ses défauts et pratiquer la vertu.
“Si tu veux”, dit Jésus. C'est un
simple appel à un don parfaitement libre. Ce que Jésus demande, c'est de l'aimer
autrement et plus exclusivement que le commun des hommes.
Cet aspect de l'amour se pratique dans toute
vie religieuse par les vœux de pauvreté, de chasteté, d'obéissance, vécus dans
le cadre de la vie en commun.
L'esprit des vœux n'est pas, ne peut pas
être de ligoter les âmes mais au contraire, de couper les amarres qui les
retiennent au monde. En dépit de la faiblesse humaine, les vœux de religion
libèrent quiconque se confie pleinement en Dieu.
Pauvreté: L'absence
de richesses assure la disponibilité à toutes les vertus. Le vœu de pauvreté,
vécu en communauté permet un rattachement plus intime au corps mystique.
L'exemple de la pauvreté religieuse agit
dans la société en démontrant la possibilité de se libérer de toute possession.
Chasteté: La chasteté
vécue dans la vie religieuse et dans la vie sacerdotale ne fait pas des refoulés
ni des hystériques. Les médecins en conviennent volontiers, la chasteté
n'engendre pas non plus des diminués.
La vie religieuse libère des égoïsmes, porte
vers les autres d'un mouvement qui ne ramène rien à soi.
Pour être chastes, les religieux ne nient
pas la noblesse du mariage; mais l'amour exclusif que l'épouse doit à son époux,
le religieux et le prêtre le vouent à Dieu, le seul qui peut être aimé sans
réserve.
Obéissance: Le vœu
d'obéissance va à l'encontre d'un instinct naturel. Il faut non seulement
renoncer à des biens matériels, il faut aussi sacrifier des jouissances d'ordre
sensible, et renoncer à sa liberté.
L'âme consacrée se soumet humblement et elle
va jusqu'à conformer son jugement à celui des supérieurs, même si les supérieurs
ne sont pas infaillibles. Car, ce n'est pas à un homme ou à une femme qu'elle
obéit. Ce n'est pas une servitude. Cette âme obéit comme membre du Christ et
elle obéit au Christ qui parle à travers les supérieurs.
L'humain n'a pas une âme assez silencieuse
ni assez docile pour percevoir toujours nettement les indices surnaturels
déposés en son âme. Dieu a pourvu à ces insuffisances en consacrant lui-même les
guides spirituels et les supérieurs, et leur obéir est une force.
L'obéissance n'est pas une force d'inertie.
Les vrais obéissants ont un caractère bien trempé et soucieux de suivre la
volonté divine.
La vie en groupe est un autre aspect de la
liberté entravée. Tout le “moi” est irrité par le frottement perpétuel de ses
droits avec ceux du voisin, de son humeur avec la sienne...
Formées au même esprit, aux mêmes tâches,
partageant joies et peines, les âmes religieuses participent vraiment à la même
œuvre, non dans une égalité uniforme mais par un consentement unanime, où les
plus forts aident les plus faibles par leurs exemples, leurs vertus et leur
travail.
À la vague d'égoïsme et de haine de notre
temps, les prêtres et les religieux doivent répondre par un témoignage vivant
d'amour et de charité chrétienne, à travers le champ d'action où ils évoluent.
Les parents essaient d’indiquer à leur
enfant comment reconnaître les appels du Seigneur pour la vocation religieuse.
Tout jeune, l'enfant réfléchit naturellement à ce que l'on veut faire de sa vie.
Il rêve de l'employer pour quelque chose de grand.
Dieu se sert des circonstances les plus
diverses pour faire naître et grandir dans l'âme appelée la volonté de se donner
totalement à Lui: lectures, conversations, rencontre d'un prêtre ou d'un
religieux, retraite...
Les motifs conscients qui déterminent le
choix de la vocation religieuse peuvent être des plus divers. Ce n'est pas la
pensée de travailler à sa propre perfection et d'assurer son propre salut qui
apparaît à l'avant-plan, mais c'est un désir de sauver les âmes, de servir
l'humanité et de l'arracher à sa misère matérielle et spirituelle.
Mais toujours à l'horizon se profile le
Christ, car on pressent que c'est en Lui que repose le salut de tous les hommes
et qu'il n'y a pas de libération possible en-dehors de Lui.
Dans bien des cas, l'appel de Dieu ne laisse
aucun doute. Ce sont les vocations heureuses qui n'ont pas de longs débats
intérieurs. La route est là, non sans obstacles ni fondrières, mais d'un tracé
net. On peut se mettre en marche avec l'aide de la grâce et travailler à
développer en soi les qualités d'un bon instrument de Dieu.
Mais il arrive aussi qu'on reste dans
l'incertitude ou qu'à une période de pleine lumière succèdent des ombres et des
ténèbres. Pour sortir de l'incertitude, on recourra aux moyens suivants:
- La prière d'abord, nécessaire plus que
jamais, puisqu'il s'agit de l'orientation de toute une vie.
- En second lieu, on tâchera de se mettre en
“état d'accueil” aussi parfait que possible à l'égard de la volonté divine.
- Enfin, on s'adressera à ses conseillers
naturels; les parents, surtout si ceux-ci sont assez chrétiens pour ne pas
rejeter a priori une vocation; le directeur spirituel auquel sa mission et son
expérience donnent les grâces et les lumières nécessaires pour étudier les cas
difficiles.
Si l'incertitude subsiste, et si aucune
décision définitive ne s'impose avec urgence, on attendra que Dieu dénoue
l'hésitation dans un sens ou dans l'autre, par les lumières qu'il lui plaira de
donner ou par les circonstances qu'il fera jaillir.
Lorsque le moment de prendre une orientation
définitive arrive, si l'incertitude n'est pas levée, on reste libre de se
décider. Cette incertitude est un signe que Dieu laisse à l'âme l'entière
décision de son choix.
C'est ainsi que certaines âmes, après s'être
loyalement interrogées, décident de rester dans le monde. De fait, Dieu peut les
destiner à un rayonnement social par le mariage ou par le célibat.
Il arrive aussi que Dieu, après avoir appelé
une âme et avoir éprouvé la loyauté de sa réponse, lui permette d'en venir à une
réalisation après un autre cheminement. Telles les âmes qui, retenues dans le
monde par d'impérieuses obligations familiales, ou faute de pouvoir supporter la
vie religieuse, se dirigent dans une mission apostolique laïque.
Le désir de mener une vie parfaite dans la
vie religieuse peut être l'amorce d'une vie sainte au milieu du monde.
Combien de prêtres et de religieux heureux
remercient leur Créateur pour le don
d’une bonne mère qui, la première,
a jeté les semences de la vocation
dans leur cœur d’enfant !
Père William
Doyle
(Lettre de l’Abbaye St-Joseph de Clairval,
Décembre 2012)
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