Au Québec, on a brûlé une quantité énorme de livres
catholiques qui défendaient vaillamment nos valeurs morales et religieuses.
Mais, heureusement, certains livres ont pu échapper à cette destruction. Et
c'est justement dans ces petits trésors d'informations que nous pouvons
retrouver les règles de vie du foyer chrétien dans lequel mari, femme, enfants
vivent intégralement dans toutes ses perspectives normales, la vocation du
mariage.
Certains diront que ces lectures sont choses du passé, et
nous ramènent à la période de la grande noirceur. Admettant que jadis tout n'a
pas été appliqué à la perfection, il n'empêche que cette époque a contribué
grandement à l'édification de la plupart de nos familles canadiennes, notamment
celles où Dieu occupait une place de choix. Ne pourrions-nous pas essayer de
nous rappeler ce qui faisait le bonheur dans nos familles à ce moment-là? Nous
n'avons pas d'autre choix que de retrouver notre ‟mémoire familiale”, cet
héritage que nous ont légué nos ancêtres.
Bien sûr, il y a toujours la mémoire de nos aînés – autant
religieux que laïques – mais à mesure que ces témoins vivants disparaissent, la
relève se fait de moins en moins présente auprès de la génération suivante pour
transmettre ces convictions. C'est ainsi que nous assistons au déclin de nos
familles, par le renversement de nos valeurs chrétiennes.
Si les mœurs sociales changent avec les époques, la loi
morale divine demeure toujours la même à travers le temps. Nous devons admettre
que pour que la société soit en santé, il faut que la famille soit construite
sur une base solide d'amour et de fidélité entre l'homme et la femme, dans le
sacrement du mariage.
On dit souvent que: ‟En voulant jeter l'eau du bain, on a
jeté le bébé avec” ! Avant de baisser les bras sur ce triste constat, il
faudrait voir s'il n'y a pas moyen de rattraper le bébé avant qu'il n'aie cessé
de respirer complètement !
Un retour sur les valeurs familiales nécessite un examen
sérieux de tous les éléments susceptibles d'influencer le cours de la vie
familiale: la préparation au mariage, le mariage chrétien, l'éducation des
enfants, le rôle des parents dans la vie de leurs enfants.
Thérèse Lacerte
(Claudette Raymond),
auteure.
─ CHAPITRE 1 ─
Il y a entre l'Église du Ciel et celle de la Terre une
merveilleuse harmonie: de même qu'au Ciel il y a différents degrés dans la
béatitude et dans la gloire, de même ici-bas, l'Église offre aux chrétiens les
moyens de sanctification qui varient selon l'état de vie qu'ils choisissent.
Dignes du Dieu qui les a établis, tous ces états sont
saints; mais tous n'ont pas la même perfection, ni la même utilité pour le
salut. Le plus élevé, sans contredit, est l'épiscopat, chargé de perpétuer à
travers les siècles la mission de Jésus-Christ sur la terre; au second rang se
place la vie religieuse, où la personne, dans un sacrifice absolu, se consacre à
Dieu tout entier.
Vient ensuite la virginité, vécue dans le célibat, et dans
le sacerdoce catholique. Enfin se présente le mariage chrétien, l'un des sept
sacrements, que Notre-Seigneur Jésus-Christ a institué pour perfectionner dans
les époux leur amour mutuel.
On rencontre dans tous les siècles des chrétiens engagés
dans le mariage, qui y pratiquent d'héroïques vertus. Citons pour exemple saint
Henri et son épouse sainte Cunégonde qui, en parfaits imitateurs de Marie, Mère
de Dieu, et Joseph, son chaste époux, ont vécu pendant vingt ans dans l'union la
plus virginale et la plus sainte. Dieu invite au plus parfait, mais sans y
obliger; en-dehors de la chasteté parfaite gardée dans le mariage, d'un libre et
mutuel consentement des époux, les époux se sanctifient en mettant des enfants
au monde, grande mission qui les associe à la puissance féconde et aux
admirables desseins du Créateur.
Le mariage est un moyen de sanctification à deux, non
seulement par la procréation et par les devoirs de la maternité et de la
paternité. Selon le Concile de Trente, le mariage opère le ‟perfectionnement de
l'amour naturel et le renforcement de l'unité indissoluble par lesquels les
époux sont sanctifiés”.
Le sacrement du mariage a un caractère indissoluble. Les
époux sont liés jusqu'à la mort de l'un des deux. Les époux comprendront que le
sacrement de mariage leur offre une richesse permanente. Sa permanence est liée
à l'existence humaine des deux époux. Donc, si au cours de leur vie, les époux
venaient à se séparer, l'union sacramentelle subsisterait aussi longtemps que
l'un d'entre les deux n'est pas décédé, interdisant par le fait même toute vie
commune avec une autre personne.
Le mariage chrétien apporte l'assurance d'une bénédiction
permanente de Dieu. Les époux doivent donc, tout au long de leur vie conjugale
et familiale, compter sur les grâces du sacrement: grâces de compréhension
mutuelle, grâces d'amour, d'obéissance, grâces de chasteté, de continence quand
il le faudra ainsi que toutes les grâces que requièrent l'équilibre et
l'harmonie familiale dans leur rôle d'éducateurs auprès de leurs enfants.
En consacrant à Dieu leur union, les époux acceptent que
Dieu gouverne leur vie. Les apparents échecs eux-mêmes ont leur fécondité
mystérieuse. Les plans de Dieu ne sont pas toujours les nôtres, et il est
nécessaire, souvent, qu'ils conduisent les époux là où ils ne voudraient pas
aller.
C'est pourquoi Dieu leur offre une grâce d'état bien
particulière et les aide à former une communauté spirituelle dans laquelle
pourront éclore des âmes nouvelles.
Il faut vivre en esprit de foi en la permanente efficacité
du sacrement de mariage. C'est pour la vie intérieure, personnelle et commune,
une source de progrès, de paix, de force, de recueillement. Puisque Dieu
travaille dans leur âme, les époux ne se laisseront pas gagner par la vaine
agitation et les inquiétudes de ceux qui prétendent mener seuls leur barque.
Quand la tempête les secouera, ils n'oublieront pas que Dieu est là.
Ce sacrement permanent confère à la vie conjugale et
familiale un caractère sacré. Et ainsi, toute activité si matérielle, si
charnelle, si humainement futile a sa valeur surnaturelle, sa grandeur; il faut
en faire un acte continu d'amour et d'offrande à Dieu. D'où l'importance de se
ménager des moments pour s'approcher de Dieu. Travaux de ménages, jeu avec les
enfants, union des corps, travail professionnel, loisirs... tout concourt à
servir Dieu, tout est pénétré par la grâce du sacrement, tout est moyen d'union
à Dieu. Il suffit d'être fidèle et docile pour réaliser l'ouverture d'âme
suffisante et recevoir pleinement les grâces du sacrement.
En plus des enfants qui en sont le couronnement normal, le
mariage crée entre deux êtres une communauté d'amour particulièrement intime, et
que Dieu a voulue ainsi. On peut même comparer cette union à celle du Christ et
de l'Église. C'est une réalité surnaturelle. L'amour de l'homme et de la femme,
consacré par Dieu dans le mariage, implique une perfection de rapports entre
deux personnes qui glorifient Dieu, et rejaillit sur chaque époux en grâces de
sanctification. Le sacrement de mariage s'applique et opère sa grâce sur les
deux âmes, qu'il unit en Dieu d'un lien spécial. C'est un sacrement à deux, qui
exige une intimité conjugale autant sur le plan spirituel que sur le plan
humain.
Plus qu'une affection humaine, Dieu a voulu ici une union
totale ‟...Une seule chair”. Dieu a voulu que l'union physique vienne affermir
et développer l'amour conjugal, source de progrès spirituel. L'union des corps
joue un rôle dans l'approfondissement de l'amour conjugal et doit être une
occasion privilégiée d'échanges spirituels entre les deux époux. Tout
naturellement, l'union physique indique à l'homme son rôle de mari et de père,
tandis que l'épouse comprendra son rôle complémentaire puisqu'elle a le
privilège sacré de porter leur enfant.
Les parents chrétiens doivent être fiers de leurs
glorieuses fonctions. En effet, ils découvrent dans leur enfant, un être
immortel fait à l'image de Dieu.
Formé par des parents croyants, cet enfant viendra
augmenter le nombre de ceux qui mettent leur bonheur à louer Dieu et à le
servir; car les leçons des parents ont sur leur enfant un empire de douceur et
de persuasion auquel rien ne saurait résister.
Fidèles à leurs devoirs, le père et la mère de famille
réussiront à faire de leurs enfants des chrétiens, tandis que leur négligence
les exposerait aux plus redoutables périls, et les conduirait aux chutes les
plus déplorables.
Par l'oubli coupable d'une seule des graves obligations
qui découlent de leur rôle de parents, les parents chrétiens peuvent
compromettre tout à la fois l'avenir et le salut éternel de leurs enfants, et du
même coup se jeter eux-mêmes hors de la voie qui mène au Ciel. D'où l'importance
pour eux de remplir, sans exception, tous leurs devoirs, et pour cela les
connaître, puisqu'ils ne sauraient, en les ignorant, les mettre en pratique.
Combien peut-être, au milieu des sollicitudes et des
préoccupations de la vie, ont perdu de vue quelques-unes de leurs obligations !
Des parents peuvent-ils un jour se dépouiller de leur
tendresse pour le fruit de leur union? Dans le plan divin, leur cœur est une
source inépuisable de continuelle sollicitude et d'amour; ils aiment leurs
enfants plus que tout au monde, plus qu'eux-mêmes !
Aimer ses enfants, rien n'est plus légitime et Dieu même
le commande; cet amour est le foyer où les parents puisent le dévouement
nécessaire à l'accomplissement de leurs devoirs envers chacun de leurs enfants;
cet amour est l'âme de tout ce qu'ils doivent faire pour le bien de leurs
enfants; mais cet amour a ses règles, et il faut savoir l'y soumettre; que
toujours, par conséquent, il soit tendre sans faiblesse, et ferme sans dureté.
Le cœur des parents se donne également à chacun de ses
enfants; courageux et constant, cet amour ne recule devant aucune peine et ne
redoute aucun sacrifice; l'ingratitude est incapable de l'abattre ou de
l'affaiblir. Mais avant tout, l'amour doit être chrétien, c'est-à-dire réglé par
la loi de Dieu.
Les parents doivent aimer tous leurs enfants sans
exception. Les préférences injustes sèment la division entre les enfants et font
aussi le malheur des parents.
L'enfant qui se sent l'objet de la prédilection de ses
parents devient orgueilleux et fier; il finit par n'avoir pour ses frères que du
mépris; tout rempli de lui-même, il est d'un insupportable égoïsme; en un mot,
c'est un enfant gâté. L'orgueil et l'égoïsme que les préférences développent en
lui le rendront bientôt arrogant, dur et insoumis à l'égard de ses parents
eux-mêmes.
Ceux qui se voient privés injustement de l'affection que
leurs parents prodiguent avec tant de profusion à leurs autres enfants,
deviennent timides, mornes et défiants dès leur plus tendre jeunesse. Plus tard,
l'envie pousse des racines profondes dans leur âme; ils seront pleins de
jalousie et quelquefois même de haine qui amène souvent les plus funestes
divisions dans les familles. Au lieu d'une filiale tendresse, ils n'auront pour
leurs parents que défiance et aversion, et ils chercheront à se soustraire à
leur direction et à leur autorité.
Insensés donc sont les parents qui n'ont que des éloges
pour un enfant favori, et qui ne savent donner presque aucune marque d'affection
à leurs autres enfants.
Dieu commande aux parents chrétiens autant un sentiment
d'amour et d'affection à l'égard de leurs enfants, qu'un dévouement efficace et
généreux qui les porte à prendre soin du corps et de l'âme de leurs enfants.
Les premiers soins corporels que les parents doivent à
leurs enfants commencent dès l'instant de la conception de l'enfant. C'est pour
eux un devoir rigoureux d'éviter tout au long de la grossesse ce qui pourrait
nuire au développement du bébé qui naîtra. Aussi, avec quel respect la maman
sera considérée comme un sanctuaire béni de Dieu, grâce qu'elle a reçue de Lui.
La vie de cet enfant se forme ainsi dans le calme d'une âme tranquille, afin
qu'il soit prédisposé, autant que possible, à une vie paisible et vertueuse.
Après la naissance de l'enfant, les parents entourent
d'une tendre sollicitude ce petit être frêle et délicat. On fera attention à ne
laisser l'enfant endurer ni le froid, ni la faim. Il ne sera jamais laissé seul,
sans surveillance. Si les parents doivent le faire garder, ils choisiront
prudemment une personne digne de leur confiance.
À mesure qu'il grandit, on accordera autant d'attention à
son développement. On veillera à ce qu'il ne soit pas soumis à de trop rudes
labeurs, à des efforts qui seraient au-dessus de ses forces.
Les parents ne reculent pas devant les efforts que
pourraient nécessiter les soins de santé pour leurs enfants.
Les parents sentent dans leur cœur d'une manière plus vive
que leur enfant les souffrances qu'ils ne peuvent adoucir. Alors, dans les
maladies de leurs enfants, ils les soignent, passant les nuits auprès d'eux,
leur rendant tous les services dont ils ont besoin.
La charité avec laquelle ces bons parents les soignent,
les encourage à souffrir avec patience, et leur apprend à se vaincre quand il
faudra rendre aux autres les mêmes services.
Les parents porteront une attention particulière aux
bonnes habitudes de tempérance dans le boire et le manger, pour apprendre à
l'enfant à tempérer ses désirs et à combattre la sensualité par la sobriété, la
maîtrise de soi, la force d'âme et l'esprit de sacrifice. Funeste à la santé,
l'intempérance appesantit encore l'esprit; elle engourdit l'âme et lui enlève
toute activité. L'étude et le travail deviennent pour l'enfant intempérant un
fardeau qu'il est incapable de soutenir. En lui les passions se développent avec
une facilité effrayante, si elles ne rencontrent pas de résistance assez vive
pour les réprimer. La chasteté, compagne et sœur de la tempérance, pourrait-elle
établir son empire dans l'âme de l'enfant dont une mère trop faible flatte la
gourmandise? La modération fait la santé de l'âme et du corps.
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(1) Claudette Raymond
est également auteure et dessinatrice des deux albums à colorier:
"Je découvre Marie en coloriant" et
"Le Rosaire expliqué aux jeunes".
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