Avortement: choisir la mère ou l'enfant?
QUESTION:
L’avortement est-il permis dans le cas où la mère mourra si elle porte son
enfant à terme ? Mon amie laissera derrière elle un mari désemparé et 2 bambins
orphelins… Ne vaut-il pas mieux sacrifier un seul enfant que de laisser souffrir
toute sa famille par la mort de la mère ?
RÉPONSE : C’est, en effet, un drame déchirant. Cependant, votre amie
mérite d’être éclairée en tout amour et vérité, afin de prendre la bonne
décision.
Une femme enceinte
On dit qu’une femme est "enceinte" sans trop penser à la signification profonde
de cette expression. Réalisons que la mère qui porte un enfant devient, par son
propre corps, l’enceinte vivante, la forteresse qui protège son bébé
encore incapable de faire face au monde extérieur.
Divers noms, un seul individu
Ce bébé, selon le stade de développement auquel il est rendu, porte divers noms
attribués par la médecine: zygote, embryon, fœtus… Mais il demeure le même
individu que lorsqu’il aura 20 ou 90 ans et qu’on l’appellera alors Alice ou
Steven.
Le fœtus n’est pas un morceau de la mère. La science génétique le démontre: dès
le moment de la conception, le bébé est déjà doté définitivement de tout son
bagage d’ADN, qui le différencie complètement de tout autre individu. En sa
première cellule est inscrit le programme de toute sa vie: tu seras une fille,
aux yeux verts et cheveux noirs, mesurant 1m30, tu mourras à 71 ans (sauf
accident ou autres facteurs extérieurs), etc.
Le bébé possède son propre groupe sanguin, souvent différent de celui de la
mère.
Et surtout, ce bébé possède une âme immortelle, que lui a donnée Dieu dès sa
conception et qui fait de lui un être humain, et non un simple animal ou une
masse de chair.
Voilà le petit être que porte la maman. Un être ayant sa propre existence,
appelé à suivre la voie de sainteté que Dieu lui a tracée, en vue d’aller
rejoindre son Créateur au Ciel, un jour.
Un agresseur ?
Souvent, on considère l’enfant à naître comme un agresseur: à cause de lui je
suis malade, ma carrière est fichue, la honte d’une grossesse mal vue m’accable,
ma vie est en danger…
Pourtant, soyons francs: qui de nous s’est spontanément engendré ? Personne ne
choisit ses parents ni le fait d’être créé: nous sommes le fruit de l’amour
gratuit de Dieu qui, dans son infinie sagesse qui nous échappe, nous a appelés à
la vie avec la collaboration de nos père et mère.
Aucun enfant à naître n’est l’agresseur de ses parents. Il est innocent.
En reniant son rôle "d’ange gardien", par l’avortement, la mère tue deux
personnes: son bébé et elle-même en son âme.
Car l’avortement direct (1) est un
péché très grave, qualifié par l’Église de "crime abominable", et puni
d’excommunication automatique pour la mère et toute personne ayant collaboré à
l’acte. (2)
Lequel choisir ?
On raconte qu’un jour, en Chine, un représentant du gouvernement se présenta au
domicile d’un couple ayant donné naissance à une fille de plus que permis par la
loi civile du pays…
Sommé d’abattre une de ses fillettes, pour rentrer dans la "légalité", le père
en larmes fit venir tous ses enfants et dit au fonctionnaire:
‟Laquelle d’entre elles voulez-vous que je tue ? Choisissez...”
Le visiteur ne put se résoudre à un tel choix, et repartit.
Si votre amie plaçait devant elle tous ses bambins et le bébé qu’elle porte,
pourrait-elle se résoudre à tuer un de ses enfants plutôt que les autres ?
Entre deux maux, choisir le moindre
Certes, il est très pénible d’être orphelin ou endeuillé de celle qu’on aime de
tout son cœur, et dont la présence nous semble une véritable nécessité.
Mais la perte de la vie est une plus grande perte que la perte du bonheur
d’être avec l’être aimé. En perdant la vie, l’enfant à naître perdra davantage
que la famille survivante.
Pire: en plus de la vie physique, cet enfant perdra la vie divine que lui
aurait apportée le Baptême. Certes, on peut espérer, avec l’Église,
‟qu’il y ait un chemin de salut pour les enfants morts sans Baptême” (CEC
#1261), mais cette espérance ne nous autorise pas à "tordre le bras de Dieu"
pour qu’Il use d’une voie extraordinaire envers ces petits. En faisant cela,
nous agissons comme Satan qui tenta Jésus au désert en lui disant: ‟Jette-toi
du haut de cet édifice car il est écrit que les anges te porteront”. Jésus
lui répliqua avec vigueur:
‟Il est écrit "Tu te tenteras pas le Seigneur ton Dieu".”
Une vie plus précieuse que l'autre ?
Le
dilemme demeure cependant: choisir entre deux vies humaines, toutes deux
éminemment précieuses et d’égale valeur – la mère et son enfant.
Mais Dieu et l’Église ne voient pas le problème sous cet angle. Il ne s’agit pas
de choisir qui mérite de vivre, mais de ne pas tuer un être innocent.
Nous ne sommes pas des animaux, mais des humains. Par conséquent, nous ne sommes
pas faits pour vivre sous la loi de la jungle (‟C’est moi le plus fort, c’est
moi qui survis”), mais sous la loi divine (‟C’est moi le plus fort, c’est
moi qui protège”).
Dieu le premier nous a donné l’exemple: lui, le plus fort, a accepté la torture
et la mort pour nous protéger, nous ses enfants petits et limités, incapables de
réparer par nous-mêmes l’outrage infini fait à notre Père. Dieu a préféré
souffrir et mourir plutôt que de nous voir aller en enfer, qui est la mort
éternelle.
Au-delà de la mort physique, c’est la Vie éternelle qui attend la maman qui
meurt pour son enfant. Sa récompense est celle d’un martyr.
La mère qui donne sa vie pour sauver celle de son enfant, c’est le reflet de
l’amour infini de Dieu qui se sacrifie Lui-même pour nous. Au-delà de la mort
physique, c’est la Vie éternelle qui attend la maman qui meurt pour son enfant.
Sa récompense est celle d’un martyr.
Une exception qui n'en est pas une
Certaines personnes affirment que l’Église permet l’avortement en cas de danger
de mort des deux: enfant et mère.
Ceci est faux. Ce malentendu vient peut-être en partie de ce que l’Église fait
la distinction entre avortement "direct" (qui est l’avortement tel que nous le
concevons dans le langage courant), et avortement "indirect" qui désigne la mort
du fœtus ne résultant pas d’une atteinte volontaire à sa vie (par exemple: une
fausse couche accidentelle).
Tandis que l’avortement direct est toujours défendu, sans exception (même
à titre thérapeutique),
comme l’est tout assassinat d’innocent, l’avortement indirect, lui, peut
ne pas être interdit par la loi divine.
Pie XII nous précise: ‟Si la conservation de la vie de la future mère,
indépendamment de son état de grossesse, requérait d’urgence une opération
chirurgicale ou une autre action thérapeutique qui aurait pour conséquence
accessoire, (nullement voulue ou cherchée, mais inévitable) la mort de
l’embryon, un tel acte ne pourrait plus être qualifié d’attentat direct à la vie
innocente. Dans ces conditions, l’opération peut être licite (permise), comme le
seraient d’autres interventions médicales similaires, pourvu toutefois qu’il
s’agisse d’un bien de valeur élevée, comme la vie, et qu’il ne soit
pas possible de renvoyer l’opération après la naissance de l’enfant, ni de
recourir à un autre remède efficace.”(Allocution 29 oct. 1951)
C’est ce raisonnement qui s’applique notamment dans le cas de "grossesse
ectopique", un accident rare de la nature où le bébé se retrouve, dans le
corps de la mère, ailleurs que dans l’endroit prévu normalement pour sa
croissance. De ce fait, le bébé est condamné à mourir à plus ou moins brève
échéance, et la mère également à moins que le médecin n’enlève l’enveloppe
contenant l’enfant, de l’endroit incongru où ce dernier s’est développé.
Cette opération n’a pas pour but, ni pour effet direct, de tuer l’enfant, mais
de sauver la vie de la mère même si l’on prévoit que l’enfant, déjà condamné par
la nature, mourra peu après son déplacement.
Il n’y a pas là d’acte positif de tuer, mais une acceptation des suites du
traitement de la mère. Si on ne faisait pas cette intervention, les deux
mourraient. En intervenant à temps, on sauve au moins la mère.
Évidemment, si la science médicale actuelle pouvait sauver l’enfant, on serait
tenu de le faire.
De plus, on doit retarder au maximum une telle intervention, pour laisser le
plus possible de temps de vie à l’enfant, ainsi que le précisait Léon XIII:
‟Est interdit tout avortement [indirect]
prématuré de fœtus ectopiques.” (Décret du 5 mai 1902)
Et on s’assurera de baptiser le fœtus dès que possible après son extraction.
Il y a entre l’avortement direct et indirect, autant de différence et de nuances
qu’entre l’euthanasie et la cessation de l’acharnement thérapeutique: dans le
premier cas, on tue la personne; dans le second, on ne l’empêche pas de mourir.
C’est donc induire en erreur que de prétendre que l’avortement est permis en
certaines circonstances, puisque l’avortement dit "indirect" n’est pas un réel
avortement au sens populaire du mot.
Dieu est au-dessus de la nature
On doit garder à l’esprit que la médecine n’est pas infaillible: sa prédiction
de l’issue fatale d’un accouchement peut être erronée.
D’autre part, toute maman qui se trouve en situation dramatique de grossesse
difficile doit garder espoir en Dieu: Il est plus fort que la nature elle-même !
Pourquoi ne pas recourir à l’intercession de nos amis du Ciel, les saints, pour
obtenir du Céleste Médecin ce que la nature ou la médecine ne peut réaliser ?
Saint Simon Stock
En 1164, la grossesse de la mère de Simon était vouée à la catastrophe: le bébé
était si gros qu’elle ne pouvait que mourir en le mettant au monde. À cette
époque, les césariennes n’existaient pas.
Elle se confia à la Vierge Marie et lui consacra l’enfant qu’elle portait. Par
protection miraculeuse, l’enfant naquit sans problèmes et la mère a survécu.
Après la mort de saint Simon, qui s'était fait moine, Dieu accomplit de nombreux
miracles par son intercession, en faveur de la maternité: résurrection d’une
mère morte en accouchant, problème de fertilité résolu, protection d’une maman
enceinte dont le fœtus mourut en son sein à la suite d’un accident, et qui ne
fut expulsé du sein maternel que deux mois plus tard, sans séquelles pour la
mère…
Sainte Gianna Berretta-Molla
Gianna (Jeanne) Berretta est née en Italie. Devenue médecin-chirurgien,
spécialisée en pédiatrie (soins des enfants), elle épouse Pietro Molla. Tous
deux désirent fonder une famille nombreuse et chrétienne.
Mais en 1961, alors qu’elle attend son quatrième enfant, et qu’elle en est à la
fin du deuxième mois de grossesse, elle est diagnostiquée pour un fibrome à
l’utérus. Elle doit se faire opérer, tout en sachant le risque que la poursuite
de la grossesse comporte pour elle. Elle supplie le médecin de sauver la vie
qu’elle porte dans son sein, et se confie à la Providence.
La vie est sauvée, elle remercie le Seigneur et passe les sept mois qui la
séparent de l’accouchement sans changer ses engagements de mère et de médecin.
Elle demande à Dieu que son enfant ne naisse pas malade.
Quelques jours avant l’accouchement, tout en se confiant toujours en la
Providence, elle est prête à donner sa vie pour sauver celle de son enfant.
‟Si vous devez décider entre moi et l’enfant, aucune hésitation: choisissez,
et je l’exige, l’enfant.”
Le 21 avril 1962, elle donne naissance à une petite fille en santé. Sept jours
plus tard, malgré tous les efforts pour sauver les deux vies, au prix de très
grandes souffrances, après avoir répété l’invocation
‟Jésus je vous aime, Jésus je vous aime”, elle meurt saintement. Elle
avait 39 ans.
Le Pape Jean-Paul II l’a canonisée le 16 mai 2004 en présence de son époux et de
ses enfants, dont celle qui doit sa naissance à l’héroïsme de sa mère et qui,
marchant sur ses traces, est devenue médecin à son tour.
Du haut du Ciel, Gianna continue d’œuvrer sans répit. De nombreux miracles ont
été et continuent d’être obtenus par son intercession, souvent en faveur des
mères dont la grossesse est dangereuse.
Un de ses plus éclatants miracles est celui qui, en l’an 2000, a permis à une
maman brésilienne de mettre au monde par césarienne, à la 32e semaine de
grossesse, une petite fille en pleine santé qui s’est développée dans le sein
maternel sans liquide amniotique pendant les 4 derniers mois !
N’hésitons pas à faire connaître et aimer sainte Gianna, particulièrement aux
mamans inquiètes et en proie à des choix douloureux.
Elle leur obtiendra peut-être un miracle. Et surtout, elle sera pour elles un
soutien par son exemple vécu, qui nous enseigne que la souffrance n’est jamais
stérile quand on la vit en union avec le Christ. La Providence n’abandonne
jamais ceux qui placent leur confiance en Elle.
Du Ciel, les mamans peuvent davantage en faveur de leurs enfants et de leur
époux, que lorsqu’elles sont sur la terre.
L’essentiel est invisible à nos yeux… La séparation ne durera qu’un temps: les
retrouvailles seront éternelles. ■
Notre-Dame de la Vie, protégez nos tout-petits !
(1) L’avortement direct désigne toute
action ou intervention qui a pour effet unique, prévu et direct, de tuer un
fœtus; ou qui se sert du meurtre du fœtus comme moyen pour arriver à un autre
but, bon ou mauvais (par ex.: préserver la santé de la mère, ou faire commerce
des tissus fœtaux). C’est un attentat direct à la vie d’un innocent.
(2) ‟Quiconque procure un avortement, si
l’effet s’en suit, encourt l’excommunication automatiquement.” (Droit
canonique, Can. 1398)
L’excommunication atteint tout Catholique de 16 ans et plus, doté de raison, qui
pose ce geste volontairement et librement, et qui a conscience de la gravité de
son geste. Par conséquent, elle touche non seulement la mère, mais tout
collaborateur direct à l’avortement.
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