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Le serviteur de Dieu:
GéRARD RAYMOND
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(QUéBEC - CANADA) 1912 - 1932
Gérard Raymond, étudiant au Séminaire de Québec, est
mort d'une hémorragie pulmonaire, le 5 juillet 1932,
à l'âge de vingt ans. Sa vie fut apparemment celle
d'un adolescent simplement fidèle à son devoir de
chaque jour, mais son Journal intime, écrit avec un
abandon charmant, nous révèle une rare union à
Notre-Seigneur, qui grandit jusqu'au désir du
martyre.
" Gérard Raymond, donné en exemple à la jeunesse
du Canada, mérite d'être connu en-dehors de son
pays ; son exemple sera pour beaucoup une lumière et
une force ". (Père Réginald Garrigou-Lagrange,
O.P.)
SON JOURNAL INTIME
à partir de l'âge de 15 ans, Gérard Raymond
entreprend d'écrire un petit journal. C'est dans ces
écrits tout simples que nous puiserons largement au
cours des lignes suivantes.
Pourquoi Gérard a-t-il écrit un journal ? Il
nous donne lui-même la réponse :
« Il faut que j'écrive chaque jour pour
m'apercevoir des progrès ou des reculs que je fais,
pour renouveler mes résolutions, pour acquérir de la
volonté ; j'en ai besoin... Je sais bien que mon
ennemi voudrait m'éloigner de ce Journal qui me
force à réfléchir (…) "
" Ce journal, ô mon Dieu, je veux qu'il soit
un long colloque avec Vous, oà je Vous dirai mes
peines et mes joies, et oà je reviendrai me
retremper dans les jours oà ma ferveur faiblira...
Je Vous remercie des grâces innombrables que
Vous m'avez accordées depuis que je l'ai commencé.
Je Vous l'offre avec tout ce que je possède pour
Votre plus grande gloire. "
Gérard n'a donc pas écrit pour les autres, pour
être lu, et cet élément contribue à faire le charme
de ses notes. Il écrit le plus simplement du monde.
Ses phrases, tout en nous parlant des choses
ordinaires, nous livrent le secret d'une âme
vraiment admirable. Son grand amour de Dieu, Gérard
l'a alimenté au foyer par excellence : la Sainte
Eucharistie.
Sa Foi en la Présence réelle de Jésus au
Tabernacle était profonde. Voici la résolution qu'il
avait prise avec un de ses compagnons de classe :
« Chaque fois que nous passerons devant une
église, nous entrerons une minute visiter Jésus.
Quoi de plus logique d'ailleurs ? Jésus est là,
notre meilleur Ami. Le plus souvent Il est seul. Il
nous invite à entrer, pourquoi refuser ? Certaines
gens pourrons nous traiter de fous. Soit ! Jamais
nous ne pourrons porter cette folie plus loin que
celle de Jésus qui a voulu Se cacher dans l'Hostie
pour toujours, s'exposer à l'indifférence, aux
mépris, aux outrages. Nous aurons beau rivaliser
d'amour avec Lui, jamais nous ne pourrons
L'égaliser (sic). »
UN PRêTRE DU BON DIEU
Aller à Jésus par Marie : l'enfant avait appris de
sa mère ce grand secret : on trouve souvent dans ses
cahiers les invocations suivantes : Marie
Médiatrice, Notre -Dame du Rosaire ! ô ma Mère !
C'est grâce à cette piété eucharistique et mariale
qu'il a pu passer à travers la vie sans souiller
sérieusement son âme. C'est lui-même qui l'indique
ingénument dans ses notes de retraite fermée, à la
fin de sa première année de philosophie :
« Je n'ai pas trouvé dans mon passé de péché grave.
Je sais que cela vient de Vous, ô Jésus, de Vous
seul. Moi, de moi-même, je ne suis que néant, je ne
suis rien, je ne suis capable que du mal, rempli de
faiblesses et d'ingratitude, toujours prêt à
m'élever au-dessus des autres avec orgueil. J'ai
peur, ô Jésus, de la vanité sotte. Apprenez-moi à
être doux et humble de cœur. »
Le 23 décembre 1927, alors qu'il commençait sa
troisième au Séminaire, il écrit :
« Si un jour je parviens à ce que j'aspire, si je
deviens un prêtre du Bon Dieu, oh ! en ce jour que
ma prière sera ardente, avec quelle ferveur je
remercierai Dieu de m'avoir donné une si bonne mère.
J'espère gravir les marches de l'autel, et même le
soupçonnez-vous ? je désire être missionnaire pour
étendre le règne de Jésus-Christ parmi les infidèles
qui vivent dans le paganisme. »
Le jeudi 23 février 1928, lendemain du Mercredi des
Cendres, il nous fait part de ses réflexions et de
son programme pour le Carême :
« Voilà le Carême commencé. Pour ma part, ne jeûnant
pas, je dois faire des sacrifices dans mes
habitudes, mon manger et tous mes actes. Le sucre va
disparaître pour moi ; je tâcherai de ne plus
manquer la Messe et surtout de la bien entendre. Le
nombre de mes visites au Saint Sacrement augmentera.
Meilleurs seront mes devoirs, mieux apprises mes
leçons, enfin je ferai tout mon possible pour plaire
à Jésus en me mortifiant. »
Il était élève de Seconde au Séminaire, quand il
écrivit cette résolution le 13 janvier 1929 :
« Hélas ! Je n'ai pas à m'enorgueillir de ma
perfection. J'en suis encore très loin, il me reste
du gros travail à faire. Le plus dur sera de mettre
à terre ma volonté, de l'arracher par lambeaux, de
la fouler aux pieds. Il sera dur aussi de devenir
humble parfaitement. »
Vigilant contre l'orgueil, il ne se laisse pas
emporter par ses succès scolaires. Le 11 mars 1929
il écrit :
« Au milieu des succès, ce grade d'académicien, ces
trois derniers concours oà je me suis classé en
premier, c'est le temps de faire taire l'orgueil,
car il élève la voix ! Je n'ai qu'à considérer ma
petitesse vis-à-vis de l'Immensité de Dieu pour
laisser là toute pensée orgueilleuse. Tout ce que je
possède, je ne le possède pas ; on me l'a prêté. Et
ce talent que je possède, ou plutôt que Dieu m'a
prêté, je dois le faire fructifier le plus possible,
sinon je manque à mon devoir. Que d'autres
considérations peuvent encore me faire baisser la
tête ! »
Christianisme intégral
Le jeune homme de 17 ans se révèle davantage dans
cette admirable prière du 26 juin 1929:
« ô mon Dieu, je veux Vous aimer de tout mon cœur.
Faites-moi chérir la souffrance cachée. Faites que
je sois passionné de faire Votre Sainte Volonté. ô
Jésus que je sois petit aux yeux du monde et grand à
vos yeux. »
à la fin des vacances de cette année-là, Gérard
écrit à son Directeur un compte-rendu des activités
et des aspirations des mois passés. En voici
quelques extraits :
« Durant mes vacances, je n'ai pas cessé de penser à
ma vocation... Il y a quelques années, en lisant une
revue des Pères Blancs, l'idée me vint de devenir
missionnaire, moi aussi. Mais plus tard (après avoir
lu un article dans l'Almanach Franciscain, un livre
par Saint François de Sales et l'autobiographie de
Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus) je rêvais d'une
vie cachée, cloîtrée, humble, loin du monde oà, tout
à Jésus, je ferai le travail de ma sanctification,
comme Dieu même me le conseillait dans toutes mes
lectures. Je choisis alors d'être Franciscain. Mes
rêves de missionnaire seraient en même temps
réalisés puisque les Franciscains vont en missions
païennes... Oà pourrai-je mieux satisfaire mes rêves
d'abaissement et de mépris ?... »
Prêtre, missionnaire Franciscain, plus que cela,
Gérard veut verser son sang pour les âmes, il veut
être martyr. Après une conférence du Père Doncœur, à
l'Université Laval, au cours de laquelle l'éminent
Jésuite avait parlé aux jeunes de l'importance de
vivre totalement ses croyances, Gérard consigne ses
réflexions :
« Moi aussi, je veux pratiquer ce Christianisme
intégral. Moi aussi, je veux placer la Croix
au-dessus de toute réalisation, je veux embrasser la
Croix, avec le Séraphique Père François dont
l'église célèbre aujourd'hui la Fête. Moi aussi, je
veux profiter de ma jeunesse pour concevoir de
grandes choses avec Foi, avec enthousiasme, pour
pouvoir les réaliser au moins un peu... Comme idéal,
être un Saint, dans toute la force du mot, avec tout
ce que réclame la Sainteté. Tout pour Jésus. Mon
Dieu et mon tout. Saint François, priez pour moi.
Jésus, aidez-moi. »
Le 13 novembre, il confirme sa résolution :
« J'ai bien médité, j'ai parlé au Bon Dieu. Le
crucifiement de Notre-Seigneur m'a fait réfléchir.
J'ai pensé que Notre-Seigneur s'était laissé
enfoncer les clous dans les mains et dans les pieds
sans mot dire. Et moi, je ne pourrais souffrir que
l'on touche ma susceptibilité, que l'on enfonce le
moindre petit clou ? Et j'ai pris la résolution de
tout souffrir patiemment (…) Oui ô Jésus,
aujourd'hui encore je recommence. Je sais que tout
seul je ne puis rien. Mais avec Vous, j'ai confiance
en Vous, en Votre Bonté, en Votre Miséricorde, Votre
Amour. Vous voulez m'attirer à Vous sur Votre Cœur,
faire de moi un Saint : faites ! Je veux Vous
laisser agir par n'importe quel moyen. Je veux Vous
aimer toujours. »
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