Parmi les édifices religieux
de la ville de Beauvais (France), la cathédrale
tient vraiment une place de choix. C'est un des
chefs-d'œuvre d'une époque où ces derniers
s'élevaient comme par enchantement.
Lorsqu'elle fut terminée, les
habitants trouvèrent que les voûtes de cette église,
sans peintures et sans tableaux et, qui de surcroît
devait raconter la vie de Notre-Seigneur et les
Gloires de Marie, étaient bien sombres et les
murailles bien nues.
On se mit donc en quête d'un
peintre pour combler ces lacunes et lorsqu'on l'eut
trouvé, le premier échevin de la ville lui dit au
nom des habitants: "Messire peintre, nous
attendons beaucoup de vous. Faites naître sur les
murailles, à l'aide de vos couleurs et de votre
pinceau, tous les saints du paradis et leur Chef.
Nous voulons que notre église soit une vraie vision
du Ciel." Le peintre répondit alors qu'il
attendrait fermement le secours divin pour mener à
bien l'entreprise et qu'il prierait la Reine des
Saints de guider elle-même son pinceau.
Alors on commença à élever des
échafaudages jusque sous les voûtes de la
cathédrale. Le peintre se mit à l'œuvre et, tout en
haut, dans le ciel bleu, au-dessus des nuages,
apparut un jour l'image de la Mère de Dieu, image si
pure, si suave, si vivante, qu'on eut pu croire que
l'artiste avait pris un Chérubin comme
collaborateur.
Avant de tracer les lignes du
divin visage, le pieux artiste avait beaucoup prié.
On peut dire qu'il avait imprimé d'abord dans son
âme l'esquisse de la Reine du Ciel et que le
chef-d'œuvre sorti de sa main était plus
l'expression de sa piété que de son talent
artistique. Et, comme nous allons le voir, Marle
elle-même montra qu'elle agréait le travail du
peintre et ses pieuses intentions.
Comme l'artiste avait achevé
son tableau et que dans une méditation muette et
prolongée, il l'admirait silencieusement, il recula
de quelques pas, pour mieux voir, oubliant qu'il
était au-dessus du vide.
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"Ô
ma Mère, sauvez-moi!" |
Brusquement la planche de
l'échafaudage cède sous ses pieds sans laisser le
temps au malheureux de se retenir à un appui
quelconque. C'est la mort certaine qui l'attend. Il
n'a que le temps de voir l'abîme sous lui, et de
jeter un cri d'angoisse à la Dame de ses pensées:
"Ô Marie, ô ma Mère, sauvez-moi !"
À cet appel de confiance et
d'amour, la Vierge peinte sur la muraille s'anime,
fait un pas en avant, laissant sur la muraille, la
silhouette de son corps frêle et gracieux. Elle tend
la main en avant alors que le peintre la saisit
d'instinct.
Les ouvriers qui travaillaient
un peu plus loin, accourent, stupéfaits. Devant eux
se présente un merveilleux tableau: une femme, d'une
grande beauté, couronnée d'un magnifique diadème qui
tient fermement un homme au dessus du gouffre.
Aussitôt, on se mobilise pour aller chercher notre
peintre. Puis, le sauvetage accompli, la Dame
reprend sa place sur la muraille blanche pendant que
les ouvriers retrouvent leur voix pour crier:
"C'est un miracle !"
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Est-ce un fait véridique?
Est-ce une légende? Je ne sais pas. L'auteur qui
signe ce fait
(1) ne le précise pas.
Mais une chose est certaine, voilà un tableau qui
pourrait très bien s'appliquer à chacune de nos
vies.
Comme le peintre de Beauvais,
tous les baptisés doivent imprimer dans leur coeur
et leur âme, l'image de la Reine du Ciel.
Par la Foi, l'Espérance, la
Confiance et l'Amour, nous devons tous porter en
nous-mêmes l'effigie de Celle qui peut nous sauver à
l'heure du danger. Comme l'artiste peintre,
n'hésitons pas dans les dangers du corps comme dans
ceux de l'âme, à crier très fort: "Ô Marie
Immaculée, gardez-moi, sauvez-moi !" Marie
entendra toujours notre prière.
Il semblerait que même la
nature se met de la partie pour nous rappeler que
Marie est notre Mère et qu'Elle veille sur nous,
jour et nuit. Ouvrons notre main (droite ou gauche)
et regardons attentivement le centre de celle-ci; ne
voyons-nous pas la lettre "M" qui est là depuis
notre naissance?
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La lettre "M" au
creux de la main. |
Certains diront que ces lignes
sont un effet de la nature et que, somme toute, cela
n'a rien à voir avec la Sainte Vierge. Je respecte
ces opinions, mais me serait-il permis quand même de
voir, dans ce "M", un signe visible qui me
rappellera, chaque fois que j'ouvrirai la main, mon
appartenance à Marie. Et tant pis si cela est perçu
comme de l'enfantillage: j'ai bien le droit de voir
dans ce qui pourrait être un "caprice" de la nature,
les initiales de ma Mère, surtout si cela m'incite à
l'invoquer.
Au fait, avez-vous remarqué
comment nous sommes heureux et fiers de porter sur
soi ou de placer sur notre bureau de travail, un
souvenir, la photo d'un être cher; certains iront
même jusqu'à se faire tatouer, sur le corps, le nom
ou les initiales d'une personne aimée; et pourtant
cela n'est pas considéré comme de " l'enfantillage
". Alors, est-ce que le fait de percevoir un M dans
les replis de ma main, le devient parce que je veux
associer cette lettre au nom de Marie? ■
Rosaire Raymond
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(1)
Tiré de la revue "Le Messager de Marie Reine
des Cœurs" - février 1909.