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Jésus
et les marchands du Temple
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Les évangiles nous rapportent le récit de la
sainte colère de Jésus chassant les marchands du
Temple de Jérusalem. Cette très sévère action
d’éclat contraste apparemment avec l’image de Jésus
"doux et humble de cœur" et celle du "Bon
Dieu"… Mais c’est parce que nous prêtons à la
colère du Fils de Dieu les attributs habituels de
nos propres colères à nous, hommes pécheurs ! Alors
que les nôtres sont la plupart du temps le fruit
d’un manque de contrôle de soi, de nos défauts et
péchés, celle de Jésus, au contraire, fut le fruit
de Sa divine Perfection, un acte de haute vertu,
autant par Ses motifs (la gloire de Dieu outragée et
le salut des âmes en péril) que par la façon dont Il
l’a exprimée. En effet, ici pas de violence
excessive et injustifiée, mais une pédagogique
vigueur appuyée de Son autorité incontestée puisque
tous lui obéissent et partent. Remarquons que si
Jésus a chassé hommes et bétail, renversé tables et
argent, Il n’a fait preuve d’aucune rudesse envers
les délicates colombes, symboles de paix et
d’innocence…
Les motifs de Sa Colère
Jésus nous donne le motif de Sa colère : "Ma
maison sera appelée une maison de prière pour toutes
les nations. Mais vous, vous en avez fait une
caverne de voleurs". (Mc XI, 17)
Pourtant, les marchands du Temple faisaient
apparemment œuvre bonne et nécessaire: ils
fournissaient les animaux destinés aux sacrifices,
pour le culte divin. Et cependant, Jésus les chasse
en les traitant de voleurs… Sans doute étaient-ils
peu scrupuleux en commerce. Mais Jésus n’en était
pas à son premier petit truand rencontré, et jamais
Il ne s’était fâché ainsi. Il y avait donc autre
chose.
En fait, Jésus se trouvait face à plus que des
pécheurs isolés. Il rencontrait une
structure de péché qui, sous prétexte de
vertu et de religion, causait du tort à Dieu et
au prochain : de l’hypocrisie à l’état pur. Une
structure de péché c’est l’institutionnalisation du
mal moral, ou une situation sociale du même type,
qui requiert la complicité, consciente ou non, de
personnes à tous les niveaux : des "cerveaux" qui
planifient, convainquent et s’adjoignent des
collaborateurs; jusqu’au simple "pion" qui laisse
courir, par lâcheté ou "je-m’en-foutisme"… Une
telle structure est la manifestation et le résultat
de multiples péchés individuels permettant au Mal de
prendre racine en quasi-institution
Les rabbins du Temple avaient donc accepté,
favorisé le vol du bien de Dieu, d’abord en
permettant d’abuser de la bonne foi des fidèles
pratiquants : "Tout ce que vous faites aux plus
petits d’entre les miens…"
Mais plus grave encore : ils avaient laissé
profaner le Temple sacré de Dieu dont ils avaient la
garde, Sa Maison érigée à Sa Gloire et destinée
uniquement au culte. La cour du Temple était devenu
une vaste et bruyante foire. Ils avaient volé Dieu
en s’appropriant le droit de disposer de Son bien de
façon contraire à la sainteté des lieux et contre la
Volonté divine. Ils étaient doublement voleurs.
Les marchands du Temple
d’aujourd’hui
Si Jésus revenait aujourd’hui, Sa colère aurait
encore plus de raisons de se manifester car les
"cavernes de voleurs" se sont multipliées. Que sont
devenus le respect et l’amour de nos Temples
catholiques où Dieu réside, dans les tabernacles, de
façon encore plus présente (c’est-à-dire Corps,
Sang, âme et Divinité) que dans le Temple de
Jérusalem? Nos Pharisiens et rabbins contemporains
portent maintenant le nom de Catholiques et sont
souvent « cousus » de bonnes intentions… Ils se
proclament d’esprit "ouvert"… et ont habituellement
bien peur de passer pour rétrogrades, ultra-romains
ou intolérants… Alors, ils laissent nos marchands
modernes s’installer bien à l’aise dans le Temple :
shows rocks, défilés de mode, banquets, réunions
syndicales, funérailles civiles, théâtre, danse,
concerts de tout acabit, expositions d’art profane,
cinéma et plus encore. Ils acquièrent ainsi une
réputation de personnes "bien humaines", qui
contribuent à renflouer la caisse de la fabrique; et
ils se paient la naïve illusion de ramener les gens
à l’Église… Tout cela au détriment de Dieu et des
âmes.
Droits de Dieu et de l’Homme
Car c’est là le point crucial. Qu’il le sache ou
non, l’homme est un être religieux : par son origine
(Dieu), par son mode de conservation (Dieu encore)
et par le but pour lequel il a été créé (Dieu
toujours). C’est écrit dans ses "gênes spirituels".
Par conséquent, s’il veut s’accomplir pleinement, il
doit pourvoir à son besoin inné de prier, d’adorer
plus grand que lui. Il a besoin de lieux sacrés, mis
à part et réservés uniquement au
culte, où il puisse plus facilement se
recueillir, prier et adorer, individuellement mais
également de façon communautaire car c’est aussi un
être social. L’église répond à ce besoin.
L’église est également l’icône de Dieu dans
notre société. Celui par qui l’univers existe a le
droit absolu d’être
représenté dans la cité par une demeure qui Lui
appartienne en propre, une demeure dans laquelle Il
réside en permanence dans l’Hostie, une maison
ouverte aux besoins spirituels de Ses enfants. C’est
pour marquer cette propriété divine que l’Église
consacre et/ou bénit les lieux de culte publics et
semi-publics (églises, chapelles de communautés
religieuses, etc.), ce qui leur confère un caractère
sacré à tel point qu’y tenir des activités
incompatibles avec la sainteté des lieux constitue,
n’en déplaise à certaines oreilles sensibles, un
sacrilège. "La liturgie de
la consécration de l'église rappelle que la
communauté offre le temple entièrement au Seigneur,
et qu'il ne peut donc pas être destiné à des usages
différents de celui pour lequel il a été consacré."
(Instrumentum laboris, 2005) C’est aussi pour cette
raison qu’une cérémonie pénitentielle de réparation
est prévue par l’Église lorsqu’un de ses temples a
été gravement profané.
Une affaire de "gros bon sens"
Puisque l’église est un lieu réservé au culte,
il tombe sous le sens que les activités profanes n’y
ont pas leur place. Il est, bien sûr, des cas où la
charité bien comprise permet d’utiliser
temporairement (et avec
respect) cette Demeure à des fins humanitaires :
hôpital de fortune en temps de guerre, refuge pour
les sans-abris, etc. Dieu approuve ces actes de
bonté appelés par la nécessité. C’est dans cet
esprit que le Droit canonique mentionne : "Ne
sera admis dans les lieux sacrés que ce qui sert ou
favorise le culte, la piété ou la religion, et y
sera défendu tout ce qui ne convient pas à la
sainteté du lieu. Cependant l’Ordinaire (l’évêque du
diocèse) peut permettre
occasionnellement d’autres usages qui ne
soient pourtant pas contraires à la
sainteté du lieu." (Can.1210)
On ne saurait nier non plus que les concerts
d’orgues peuvent difficilement se tenir ailleurs que
dans les églises : il est, en effet, malaisé de
transporter orgue et tuyaux d’une salle de concerts
à une autre… La Congrégation pour le culte divin
précisait, dans une note du 5 novembre 1987: "Il
convient d'ouvrir la porte de l'église à un concert
de musique sacrée ou religieuse, et de
la fermer à toute autre espèce de musique".
Pour le reste, on peut discerner 3 catégories
d’événements :
-
Les événements comprenant des éléments
mauvais en soi, immoraux.
Cette immoralité peut se traduire à travers
certaines musiques qui, par leur structure même
(rythme et façon de jouer les instruments) ont
comme effet habituel de susciter un état de
transe ou d’induire des pulsions sexuelles ou
anormalement agressives chez l’auditeur : hard
rock, heavy metal, musique lascive, etc. Les
paroles, la gestuelle, l’habillement, la
thématique, le contexte peuvent également être
mauvais en soi. Est immoral ce qui va contre
l’enseignement de l’évangile et du Magistère :
blasphèmes, violence gratuite, hérésies,
attitudes ou propos à caractère sexuel ou
hautement sensuel, propos à double sens, etc.
Malheureusement de nos jours, la plupart des
spectacles de danse, shows rock et populaires,
défilés de mode, pièces de théâtre et spectacles
d’humoristes affichent, en tout ou en partie, ce
genre de contenu. Ces événements ne devraient
jamais être offerts au public, et
encore moins se dérouler dans
une église, ce qui serait une
profanation des lieux saints, un sacrilège.
C’est une affaire de "gros bon sens", mais
il semble que ce dernier soit en perte de
vitesse, depuis quelques décennies… On pourrait
ici citer le cas, parmi d’autres, de l’église
St-R… au Québec où, après la tenue d’un show
punk rock, on pouvait encore y déceler de forts
relents de marijuana… Ou encore ce diocèse qui a
prêté nombre de ses églises pour une série de
conférences d’un prêtre bien connu pour ses
enseignements contraires à l’évangile…
-
Les événements bons en soi, mais purement
profanes. Pensons aux
banquets; à certains concerts, certaines
expositions d’œuvres d’art et conférences, pour
n’en nommer que quelques-uns. Ces événements
socioculturels ont leur place dans les salles de
spectacles, les auditoriums, les salles de
réception, etc. Mais étant donné qu’ils n’ont
aucun rapport avec le culte divin, et qu’ils
sont source de mondanités, de distractions
(applaudissements, plaisanteries et rires,
conversations mondaines, cigarette,
consommations, etc.), ceux-ci ne sont pas non
plus appropriés au caractère sacré de l’église
et n’ont pas le droit de
s’y tenir. Utiliser, sans nécessité grave de
charité, un lieu sacré à des usages profanes,
c’est ̶ le mot le dit ̶ le
profaner…
-
Les événements qui, sans être liturgiques ou
du culte, sont néanmoins à couleur religieuse.
Encore là, gare aux illusions… Tout ce qui
brille n’est pas or, tout ce qui porte un nom
religieux ne l’est pas nécessairement. Pensons
notamment à une certaine comédie musicale
mettant en vedette des « religieuses » yéyées
chantant du rock ‘n roll… ou encore une certaine
« messe » d’un groupe rock québécois qui n’a de
messe que le nom… Et soulignons, en passant, que
le fait que le/les artiste(s) soit laïques ou
membres du clergé n’a aucune incidence sur la
compatibilité ou non d’une activité avec le
caractère sacré d’une église.
Dans la catégorie des événements mi-mondains
mi-religieux, on peut placer la plupart des
spectacles dits « gospels » ou chants religieux
populaires. Ils sont religieux par leur contenu
de paroles, mais mondains et profanes par le
style musical et l’ambiance de « spectacle » qui
s’en dégage. Ils ne sont pas mauvais en soi, ils
sont même habituellement très bons; mais leur
présentation invite les assistants à un
comportement de spectacteurs-consommateurs
tournés vers l’artiste et
ses performances (avec toutes les mondanités que
cela comporte), et non de priants recueillis
tournés vers Dieu. Pour
cette raison, la tenue de tels événements en des
lieux sacrés ne convient
pas car elle nuit au climat de maison de prière
telle que voulue par Dieu pour Son Temple.
Invasion de domicile
Nous serions outrés, avec raison, si un de nos
amis se présentait chez nous, nous enfermait dans le
placard et utilisait notre maison pour sa business,
en nous déclarant : «J’utilise ta maison au lieu
de mon bureau car c’est plus pratique et moins cher
pour moi. J’agis ainsi parce que tu es mon ami et
que tu ne pourras rien dire sans avoir l’air de
manquer à tes devoirs d’amitié. Quand j’aurai
terminé, tu pourras reprendre possession de ton
domicile.» C’est pourtant le même traitement
odieux que nous infligeons à Dieu chaque fois que
nous utilisons ses églises pour des usages mauvais
ou inappropriés. Jésus-Hostie est, le plus souvent,
enfermé dans la sacristie (quand Il n’est pas
carrément laissé dans le Tabernacle…) pendant que
l’être humain prend Sa place pour se faire
applaudir, pour faire business… Y avons-nous pensé?
De graves conséquences
Il est triste de constater que les fidèles, même
parmi les plus pratiquants, sont de moins en moins
respectueux à l’église: on passe devant le
Tabernacle sans génuflexion, on communie sans
recueillement (croit-on encore toujours à la
Présence Réelle? C’est à se demander…). On s’y
présente vêtu comme à la plage, gomme à mâcher à la
bouche…On quitte précipitamment son banc sitôt que
la Messe semble achevée (sait-on même pourquoi on
est si pressé?…) mais on n’hésite pas à demeurer
longuement planté dans l’allée à discuter haut et
fort, avec parents et amis, des derniers potins de
la paroisse, du restaurant à venir, de nos problèmes
de santé et du dernier-né de Pierre, Jean, Jacques…
Certaines églises, après la Messe, ressemblent
beaucoup plus au mail bruyant d’un centre commercial
qu’à la Maison de Dieu, Sa maison de Prière…
Le fait d’avoir laissé s’installer la
malheureuse habitude d’événements profanes tenus
dans les Lieux Saints est pour beaucoup dans cette
chute du respect et de la Foi en la Présence de
Jésus au Tabernacle. Remarquons, en passant, que
l’évangile nous précise que Jésus a chassé non
seulement les vendeurs du Temple, mais aussi les
acheteurs… (Jn 22,19) Ce qui veut dire que nous
avons tous une responsabilité dans le maintient du
respect de nos églises. Chaque fois que nous
participons à ces événements indus, même comme
simples spectateurs, nous agissons comme ces
acheteurs du Temple, nous encourageons l’irrespect.
Est-ce vraiment ce que Dieu attend de nous?
Peuple, vois à tes affaires!
Certains argumenteront que l’église «appartient
au peuple»… Si l’on parle ici du Peuple de Dieu, de
Son Corps mystique, alors soyons conséquents : un
corps qui veut survivre permettra-t-il qu’on frappe
sa tête sans se défendre? Or, la tête du Corps
mystique, c’est le Christ… Ce même Christ qu’on
néglige dans son Tabernacle, à Qui on dénie le droit
d’avoir Sa propre maison respectée. Non seulement
laissons-nous impunément notre Tête, plus que jamais
couronnée d’épines, se faire frapper; mais encore
sommes-nous assez insensés pour nous la frapper
nous-mêmes contre le mur de notre lâcheté et de
notre commodité, encore et encore… Et non seulement
nous blessons-nous la Tête; nous blessons aussi le
Corps mystique composé des fidèles qui ont le droit
d’avoir accès à leurs église pour y prier. Que de
fois ne voyons-nous pas des Messes annulées,
reportées, ou les églises inaccessibles aux fidèles
parce que «réservées aux préparatifs du spectacle»…
Il est triste de constater que, de plus en plus,
nos églises perdent leur identité de lieux sacrés,
pour devenir des salles à tout faire, des cours de
récréation. Nous semblons considérer Dieu comme un
«pote», un copain bonnasse, un peu «sans dessein»,
de qui on peut abuser sans aucune conséquence
fâcheuse. Est-ce là de l’amour? Est-ce là du
respect? Est-ce ainsi que nous aimerions être
traités?
Qu’attendons-nous pour changer nos habitudes ?
Saurons-nous le faire par amour, ou faudra-t-il que
le Christ revienne chasser Lui-même les modernes
vendeurs et acheteurs du Temple ?…
Marie-Chantal
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