Le 19 août 1917, Notre-Dame n'a pas simplement demandé de prier pour la
conversion des pécheurs ; elle a dit : "Priez. Priez beaucoup et faites des
sacrifices pour les pécheurs". Si nous voulons sauver des pécheurs de l’enfer, nous devons donc non seulement
prier, mais aussi faire des sacrifices pour eux.
C’est la quatrième fois, dans l’histoire de Fatima, qu’il est demandé de faire
des sacrifices pour les pécheurs.
Lors de l’apparition de l’été 1916, l’Ange avait déjà dit : "Offrez constamment
au Très-Haut des prières et des sacrifices." Lucie lui demanda alors : "Comment
devons-nous faire des sacrifices ?" Et l’Ange répondit : "De tout ce que vous
pourrez, offrez à Dieu un sacrifice en acte de réparation pour les péchés par
lesquels Il est offensé, et de supplication pour la conversion des pécheurs. (…)
Surtout, acceptez et supportez, avec soumission, les souffrances que le Seigneur
vous enverra."
Le 13 mai 1917, Notre-Dame demanda aux petits voyants : "Voulez-vous supporter
toutes les souffrances que Dieu voudra vous envoyer, en acte de réparation pour
les péchés par lesquels Il est offensé, et de supplication pour la conversion
des pécheurs? ", expression presque identique à celle de l’Ange en 1916.
Et le 13 juillet, Marie leur dit : "Sacrifiez-vous pour les pécheurs", puis
demanda de réciter une prière : "Dites souvent, mais spécialement chaque fois
que vous ferez un sacrifice :
"Ô Jésus, c’est par amour pour Vous, pour la conversion des pécheurs, et en
réparation des péchés commis contre le Cœur Immaculé de Marie"."
L’Ange comme Notre-Dame demandent donc bien d’associer la prière et le
sacrifice. Cette demande de faire des sacrifices est un point essentiel du
message.
Malheureusement, l’expression "faire des sacrifices" fait souvent peur. Beaucoup
s’imaginent qu’il faut s’imposer de grandes pénitences. Certes, les petits
voyants s’en imposaient ; mais, ce n’est pas ce que demande le message de
Fatima, tout au moins pas en premier lieu.
L’Ange et Notre-Dame demandent, avec des termes quasiment identiques, d’accepter
et de supporter avec soumission toutes les souffrances que Dieu nous enverra.
S’imposer de petits sacrifices, comme de petites restrictions dans le boire, le
manger ou les petits plaisirs de notre vie, est fort utile. Mais ces sacrifices
que l’on s’impose volontairement, sont surtout nécessaires pour exercer notre
volonté. La demande de Fatima concerne avant tout les sacrifices que nous ne
choisissons pas.
C’est ce qu’expliqua sœur Lucie dans une lettre qu’elle adressa le 28 février
1943 à Monseigneur Feirrera, un de ses confesseurs : Voici la pénitence que le
bon Dieu demande aujourd’hui : c’est le sacrifice que chacun doit s’imposer à
soi-même pour mener une vie de justice dans l’observance de sa loi. Et Il désire
que l’on fasse connaître clairement cette voie aux âmes, car beaucoup donnent au
mot "pénitence" le sens de grandes austérités, et comme elles ne se sentent ni
force ni générosité pour cela, elles se découragent et se laissent aller à une
vie de tiédeur et de péché.
Du jeudi au vendredi, me trouvant dans la chapelle avec la permission de mes
supérieures, à minuit, Notre-Seigneur me dit :
"Le sacrifice qu’exige de chacun l’accomplissement de son propre devoir et
l’observance de ma loi, voilà la pénitence que je demande et que j’exige
maintenant."
Un peu plus tard, dans une lettre du 4 mai 1943, elle confia au père Gonçalvès, un autre de ses confesseurs :
"Il [Jésus] désire que l’on fasse comprendre aux âmes que la véritable pénitence qu’Il veut et exige maintenant
consiste avant tout dans le sacrifice que chacun doit s’imposer pour accomplir ses propres devoirs religieux et matériels."
Ceci est parfaitement conforme aussi bien à la Tradition qu’à l’enseignement des saints.
Car la véritable pénitence est l’annihilation de sa propre volonté. Saint François de Sales enseignait :
"Peu importe au démon que vous déchiriez votre corps pourvu que vous fassiez votre propre volonté.
Il ne craint pas l’austérité, il craint uniquement le sacrifice de votre volonté. (…) "
Le misérable pharisien jeûnait deux fois la semaine et périt. Le publicain n’avait point jeûné et fut justifié".
Et encore : "On ne vous demande pas de sacrifier votre vie, mais de conserver la patience dans un petit contretemps".
Notre-Seigneur lui-même enseigna à sainte Marguerite-Marie :
"Tu te trompes, ma fille, en pensant Me plaire par des mortifications où ta propre volonté fait plier celle des supérieurs…
Je rejette tout cela comme des fruits corrompus par la volonté propre, laquelle M’est en horreur.
J’agréerais davantage que tu prennes tes commodités par obéissance, que de t’accabler d’austérités par ta propre volonté."
Et à sainte Catherine de Sienne, Notre-Seigneur enseigna :
"Je m’attache peu à celui qui veut mortifier son corps par la pénitence, sans vaincre et tuer sa propre volonté.
Ce que Je préfère, ce sont les actes d’une courageuse patience et les vertus intérieures.
Je veux que les œuvres de pénitence et les autres pratiques soient le moyen et non pas le but de l’âme."
Voici aussi ce que sœur Lucie déclara à un évêque brésilien, Monseigneur Palha:
la pénitence du devoir d’état accompli parfaitement, voilà ce que Notre-Dame réclame.
Il y a des âmes qui pensent à de grandes mortifications extraordinaires, à des macérations,
dont elles ne se sentent pas capables, si bien qu’elles perdent courage. Lorsque Notre-Dame exige la pénitence,
Elle parle de l’exact accomplissement du devoir d’état: c’est cela la sainteté.
Le Ciel ne nous demande donc pas de grandes pénitences, de dures mortifications ou de longues prières.
Non! Notre-Dame et l’Ange nous demandent simplement de supporter les souffrances que nous rencontrons
chaque jour et de les offrir pour la conversion des pécheurs. Donc Dieu ne demande pas des pèlerinages, des mortifications pénibles,
de longues veilles en prière, etc., toutes choses fort louables par ailleurs
(sous réserve de les choisir avec discernement et de préférence avec l’avis d’un confesseur).
Non! Ce qu’Il demande, c’est l’humble offrande des difficultés de la vie quotidienne:
nos échecs, nos infirmités; pour certains la solitude (souffrance particulièrement dure);
les multiples petites contrariétés de la vie quotidienne; pour les pères et mères de famille, l’accomplissement de leurs devoirs de parents:
tenue du foyer, éducation des enfants, sacrifices pour les mettre dans de bonnes écoles, etc.
Autre exemple: parmi les sept œuvres de miséricorde spirituelle, il y a "supporter patiemment les personnes ennuyeuses".
Que ce soit à l’école, au bureau, dans la rue, à la maison, dans les transports, etc.
Y a-t-il un seul jour où nous ne rencontrions une personne ennuyeuse, que ce soit notre patron,
notre chef de service, un collègue de bureau, un voisin…?
Que d’occasions nous avons ainsi d’offrir des sacrifices pour la conversion des pécheurs !
Et si possible, offrons tous ces sacrifices en récitant une prière, en particulier celle enseignée par Notre-Dame le 13 juillet 1917:
"Ô mon Jésus, c’est par amour pour Vous, pour la conversion des pécheurs,
en réparation des outrages commis envers le Cœur Immaculé de Marie et pour le Saint-Père."
Ainsi, nous répondrons à la demande de Notre-Dame de prier et de faire des sacrifices pour les pécheurs. ■
Yves de Lassus
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